jeudi 29 mars 2018

L'image d'un coteau quand la lumière chavire


Résultat de recherche d'images pour "coteau"L'image d'un coteau quand la lumière chavire : l'enfant est seul sous l'arbre seul avec des mots sans suite. Et soudain monte le bruit des mantes comme un frisson d'échine. Aucun secours ne viendra de la fille aux tresses bleues en bas du chemin : elle fait des niches aux ronces et s’enivre de miel. L'effroi reste sans partage. L'oiseau s'est tu dans les plis du jardin. Une bête blanche rejoint l'ombre d'un caillou. L'enfant rit. Il va se consumer. Qu'a-t-il entendu du silence sous ses pas ? Comment s'en délivrer ? La fenêtre assombrit le plancher de sa chambre fermée ; un grain de plâtre tombera sur les poussières allongées près du lit et les ombres auront des charivaris. Je rassemble ici, entre chambre et coteau, mes enfances de berges et de margelles, de courtilières courant sous les humus, de corps figés dans la langue. Mais le cercle de la lampe se défait déjà. Le silence ne tient plus mes mémoires.
Les mots ont du sang sur mes lèvres.
Le regard ne tient plus dans la marche. Des plis de linge blanc traversent la mémoire. Il a fallu acharner sur eux le fer à chaud, oublier jusqu’à l’oubli des taches coupables. Le printemps porte l'aube des souvenirs quand sonnaient les beffrois et que l'enfance avait rétréci les gestes. L'arbre n'y pouvait rien dans sa relègue. Ses promesses étaient trompeuses dans le silence des dimanches raidis depuis toujours.
Il fallait boire jusqu'au fond du corps toute la lie.
Les oiseaux s'étaient couchés dans les guérets. Des sucs étranges pleuraient sous les écorces. Le ciel allait s'ouvrir et mes genoux tremblaient, ma peau prenait son mauvais grain des mauvais souvenirs. N'importe quoi pouvait surgir des taillis où crissaient les ronciers, courtilière noire et mante verte, nœud de serpent à mon cou.
Je n’ai plus dix ans depuis longtemps. Le silence reste à l’étroit sous les fenêtres du jardin.  L'herbe retient son souffle au passage des bêtes sans mémoire. L'oiseau se détourne encore du chant. J’ai fait trop de rêves trop rêches, mon corps s'est abruti si souvent comme une masse. Il faudrait courir dans le jour qui monte, adresser au ciel des élans et des joies, délivrer l'herbe et l'oiseau des signes trompeurs au fond des combes.
Le silence pourrait se déplier entre les peaux mortes. Les ombres n’auraient plus de faux bonds dans la marche. Un peu de paix s’écrirait dans les traverses du poème. Enfin.

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