Considérons les peuples au sens large. Toutes les catégories sociales sont touchées par le grand divorce d'avec les politiques même si elles ne réagissent pas à l'identique. Entendons par "politiques" aussi bien les hommes que leurs propositions. Ce phénomène n'est pas nouveau. Il a engendré des révolutions, des guerres partout dans le monde. Mais sa gravité est aujourd'hui sans pareille. Il englobe la totalité des rapports humains dans leur dimension économique, sociétale et culturelle. Divorce s'écrit au pluriel.
Reprenons le fil qui nous a conduits où nous en sommes depuis la fin des années 1960. La montée et l'aggravation du chômage dû aux chocs pétroliers constitue un commencement. La classe politique française dans son ensemble n'a pas su analyser une situation qui lui échappait. Toute l'Europe de l'Ouest fut ainsi prise au dépourvu. Encore attachée au concept d'Etat-Providence, elle hésita à utiliser le hachoir libéral. Jusqu'à l'arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher au Royaume-Uni puis de Ronald Reagan aux Etats-Unis. A cette époque, seuls les ouvriers et les employés souffraient des restructurations industrielles. En France, l'avènement de François Mitterrand brouilla davantage les liens qui unissaient encore la population dans son ensemble et les représentants de la classe politique. La Gauche, espérée depuis longtemps, choisit en 1983 la rigueur économique, au détriment de son électorat historique. Malgré un parti communiste demeuré puissant et des syndicats encore épargnés par la désaffection, la France "d'en bas" se mit à douter. Pouvait-on faire confiance aux socialistes et à leurs alliés pour corriger les inégalités ? Alors que la "nouvelle pauvreté" s'installait à la vue de tous dans la rue, les stations de métro... Et l'expression même de la politique ne changeait-elle pas de nature ? Bernard Tapie et Yves Montand sur écran aux heures de grande écoute. Pour exalter les formidables occasions d'entreprendre que générait la crise... La multiplication des chaînes de télévision, la glorification des puissances de l'argent ne fit qu'accroître ce spectacle médiatique, allant filmer, avec leur consentement, hommes et femmes de gouvernement jusque dans leur intimité.
Pendant ce temps, le chômage continuait à grimper, les organisations caritatives à tendre la main aux démunis. Fait nouveau, les cadres moyens puis, dans une moindre mesure, les cadres supérieurs étaient désormais atteints. Sortir d'une école de commerce réputée, par exemple, ne garantissait plus d'avenir radieux. Le Premier ministre Jospin avoua son impuissance. " L'Etat ne peut pas tout faire. " En écho, les partisans d'une économie déréglementée, dopés par l'effondrement du bloc soviétique, tonnaient contre l'assistanat et brandissaient, déjà, le chiffon rouge de la dette nationale. L'Union européenne, cornaquée à courte vue, enfonçait le clou du "laisser faire/laisser passer" cher à Monsieur Guizot. La France "du milieu", déboussolée à son tour, rejoignit la piétaille des sceptiques. Se mit à vilipender la caste de l'énarchie, forcément incapable.
Les pensées réductionnistes, du Front National, proliférèrent. "La France n'est plus la France. Il y a trop d'étrangers. Les Chinois et les émirs vont nous manger." Le 21 avril 2002, les téléspectateurs découvrirent que Jean-Marie Le Pen allait participer au deuxième tour de l'élection présidentielle.
Pendant ce temps, le chômage continuait à monter, les organisations caritatives à panser des plaies de plus en plus graves.
C'est dans ce contexte de sinistrose aiguë que Nicolas Sarkozy arriva aux affaires. Son volontarisme économique se heurta à la crise financière de 2007/2008. Sa réforme des retraites, son exhibitionnisme télévisuel, ses implications dans des affaires opaques aggrava encore la situation. Le Front National déguisé en agneau au service des faibles accrût sa percée. Le Parti communiste et le syndicalisme perdirent la plupart de leurs bataillons. La gauche de la gauche, désunie, ne parvint pas à profiter des mécontentements. Le grand divorce d'avec les politiques, ressenti par le plus grand nombre, était consommé.
Rien n'a changé avec la présidence molle de François Hollande. Le chômage continue son ascension. Les organisations caritatives ne savent plus où donner de la tête et du coeur. La Commission européenne exerce des pressions de plus en plus lourdes sur les états membres pour qu'ils engagent des réformes structurelles et réduisent leur déficit budgétaire. Des inquiétudes déjà présentes se développent. De nouvelles menaces apparaissent. Dans le domaine de la santé, de l'éducation, de l'agriculture, de l'écologie, de la consommation, de la politique étrangère, du terrorisme. La France "d'en haut" rejoint les rangs des égarés. Un ingénieur, un directeur commercial ne pèse rien face au rouleau compresseur du Marché.
Ce constat à peine esquissé, que faire ? Comment redonner du sens à l'action politique afin que les citoyens retournent aux urnes ? Comment sortir de l'ère du soupçon généralisé ? L'immédiateté de l'information devenue objet publicitaire, les réactions anonymes sur les réseaux sociaux n'incitent pas à l'optimisme. La mondialisation radieuse d'Alain Minc n'est pas pour demain. Le local comme l'universel se fracassent contre la loi d'airain de [ce qui se compte au mépris de ce qui compte]. Attendre qu'adviennent sur la scène politique des hommes et des femmes providentiels est une illusion tragique. La haute finance a entravé l'action d'un Barack Obama pourtant animé des meilleures intentions. Les hauts dirigeants de l'économie numérique envisagent de se séparer du reste du monde en créant de micro Etats offshore. En Europe, les régions les plus riches ne veulent plus payer pour les plus pauvres, à l'intérieur même de nations unifiées depuis des siècles. Alors qu'une autre crise financière va terrasser les hommes encore debout dans les prochaines années.
Pendant ce temps, la mini reprise de la croissance martelée comme un mantra ne réussit pas à occulter la réalité. Le chômage et l'exclusion progressent toujours. Les organisations caritatives manquent cruellement de moyens pour parer aux urgences. Et Marine Le Pen pourrait bien entrer à l'Elysée en 2022.
Avant la guerre des jeunes contre les vieux.
Avant la guerre des oubliés contre les petits nantis.
Avant la guerre des petits nantis contre les moyens nantis.
Avant la guerre des religieux contre les athées.
Avant la guerre de tous contre tous.
Et c'est ainsi que Cassandre pleure. Des larmes de sang. Des larmes de cendres.
Pendant ce temps, le chômage continuait à grimper, les organisations caritatives à tendre la main aux démunis. Fait nouveau, les cadres moyens puis, dans une moindre mesure, les cadres supérieurs étaient désormais atteints. Sortir d'une école de commerce réputée, par exemple, ne garantissait plus d'avenir radieux. Le Premier ministre Jospin avoua son impuissance. " L'Etat ne peut pas tout faire. " En écho, les partisans d'une économie déréglementée, dopés par l'effondrement du bloc soviétique, tonnaient contre l'assistanat et brandissaient, déjà, le chiffon rouge de la dette nationale. L'Union européenne, cornaquée à courte vue, enfonçait le clou du "laisser faire/laisser passer" cher à Monsieur Guizot. La France "du milieu", déboussolée à son tour, rejoignit la piétaille des sceptiques. Se mit à vilipender la caste de l'énarchie, forcément incapable.
Les pensées réductionnistes, du Front National, proliférèrent. "La France n'est plus la France. Il y a trop d'étrangers. Les Chinois et les émirs vont nous manger." Le 21 avril 2002, les téléspectateurs découvrirent que Jean-Marie Le Pen allait participer au deuxième tour de l'élection présidentielle.
Pendant ce temps, le chômage continuait à monter, les organisations caritatives à panser des plaies de plus en plus graves.
C'est dans ce contexte de sinistrose aiguë que Nicolas Sarkozy arriva aux affaires. Son volontarisme économique se heurta à la crise financière de 2007/2008. Sa réforme des retraites, son exhibitionnisme télévisuel, ses implications dans des affaires opaques aggrava encore la situation. Le Front National déguisé en agneau au service des faibles accrût sa percée. Le Parti communiste et le syndicalisme perdirent la plupart de leurs bataillons. La gauche de la gauche, désunie, ne parvint pas à profiter des mécontentements. Le grand divorce d'avec les politiques, ressenti par le plus grand nombre, était consommé.
Rien n'a changé avec la présidence molle de François Hollande. Le chômage continue son ascension. Les organisations caritatives ne savent plus où donner de la tête et du coeur. La Commission européenne exerce des pressions de plus en plus lourdes sur les états membres pour qu'ils engagent des réformes structurelles et réduisent leur déficit budgétaire. Des inquiétudes déjà présentes se développent. De nouvelles menaces apparaissent. Dans le domaine de la santé, de l'éducation, de l'agriculture, de l'écologie, de la consommation, de la politique étrangère, du terrorisme. La France "d'en haut" rejoint les rangs des égarés. Un ingénieur, un directeur commercial ne pèse rien face au rouleau compresseur du Marché.
Ce constat à peine esquissé, que faire ? Comment redonner du sens à l'action politique afin que les citoyens retournent aux urnes ? Comment sortir de l'ère du soupçon généralisé ? L'immédiateté de l'information devenue objet publicitaire, les réactions anonymes sur les réseaux sociaux n'incitent pas à l'optimisme. La mondialisation radieuse d'Alain Minc n'est pas pour demain. Le local comme l'universel se fracassent contre la loi d'airain de [ce qui se compte au mépris de ce qui compte]. Attendre qu'adviennent sur la scène politique des hommes et des femmes providentiels est une illusion tragique. La haute finance a entravé l'action d'un Barack Obama pourtant animé des meilleures intentions. Les hauts dirigeants de l'économie numérique envisagent de se séparer du reste du monde en créant de micro Etats offshore. En Europe, les régions les plus riches ne veulent plus payer pour les plus pauvres, à l'intérieur même de nations unifiées depuis des siècles. Alors qu'une autre crise financière va terrasser les hommes encore debout dans les prochaines années.
Pendant ce temps, la mini reprise de la croissance martelée comme un mantra ne réussit pas à occulter la réalité. Le chômage et l'exclusion progressent toujours. Les organisations caritatives manquent cruellement de moyens pour parer aux urgences. Et Marine Le Pen pourrait bien entrer à l'Elysée en 2022.
Avant la guerre des jeunes contre les vieux.
Avant la guerre des oubliés contre les petits nantis.
Avant la guerre des petits nantis contre les moyens nantis.
Avant la guerre des religieux contre les athées.
Avant la guerre de tous contre tous.
Et c'est ainsi que Cassandre pleure. Des larmes de sang. Des larmes de cendres.
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