Le feu. Je ne l'ai pas. Né dans un
ventre glacé par les fièvres, je ne l'ai jamais eu. Je n'en veux pas non plus.
Ma raison s'y oppose depuis toujours. Trop de symboles surexposés. Trop de
métaphores mal pétries. Le feu de l'amour tue aussi sûrement que le feu de la
guerre puisque, à la fin du compte, on est refroidi. Ce n'est pas que je me
détourne des émotions fortes, des sentiments vibrants, voire de certains
dérèglements des sens. Mais le feu, malgré ses bienfaits ancillaires, le chaud et le cuit, me fait fuir comme une
bête sauvage aux premières heures de la vie. Les ombres qui hantent sa lumière,
fût-elle celle d'un lumignon, sont des serpents. Quand on les aperçoit, il est
déjà trop tard. L'effroi crépite dans les yeux. La peau se met à grésiller. Les
veines et les artères gonflent avant d'éclater. Des lames découpent les
muscles. Comment échapper à l'équarrissage ? Où trouver un souffle assez
puissant pour éteindre ce qui étreint ? Dans quelle mémoire ? Dans quelle
volonté ? Je n'ai ni l'une ni l'autre. Ma carcasse est vide comme était vide le
ventre de ma mère. Finirai-je, en un cauchemar baconien, suspendu à un croc de
boucher ? Reluqué par d'autres corps en peine ? Ou bien, enfouis dans la
glaise, mes viscères auront-ils à subir de lentes dévorations ? Ma raison
encore s'insurge. Mon instinct se rebelle. Une seule solution s'impose. Le feu.
Celui-là même dont on s’est tenu éloigné pendant la vie. Effacer tout ce qui a
entravé. Dans la chair comme dans l'esprit. Puis disperser les poussières
irréductibles. L'air se chargera d'achever le travail de disparition. Retourner
avec lui dans l'invisible.
image pompesfunebrestoulouse.com
J'ai écrit ce texte il y a quelques années pour une revue dont c'était la thématique.
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J'ai écrit ce texte il y a quelques années pour une revue dont c'était la thématique.
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