mardi 11 juillet 2023

Chez le médecin, cocasserie

 Hier, je suis allé chez le médecin, un remplaçant, pour renouveler mon traitement de vieux cardiaque un peu goutteux. Il me demande ce que je fais. Je lui dis que je suis à la retraite. Alors, il me demande ce que je faisais avant. Je lui réponds que j'étais instituteur. Il m'ausculte. Le coeur tient la route, les poumons aussi. Puis, cependant qu'il imprime mon ordonnance, il me demande à quoi j'occupe mes journées. Je lui dis que je suis tout le temps dans les livres, que je lis beaucoup, que j'ai toujours beaucoup lu. Curieux et avec le sourire, il s'enquiert de ma lecture du moment. Je lui dis que je lis La montagne morte de la vie, roman de Michel Bernanos, fils de. Je lui raconte. Un galion est perdu au milieu de l'océan, immobilisé pendant des mois parce que le vent a pris la poudre d'escampette. Les marins n'ont bientôt plus rien à manger. Ils se mutinent, tuent le commandant, se tuent entre eux et dévorent leurs congénères. Il n'y aura que deux rescapés, le mousse et le cuisinier. Lesquels finissent par débarquer sur une île qui est plus que mystérieuse...

Le médecin m'écoute, a toujours le sourire. Il me demande aussi si je vais bien dans ma tête et je lui dis que je fais de mon mieux par les temps qui courent. Puis il me dit : Avant, vous étiez prof de français, non ? Alors je ris : je viens de vous dire que j'étais instituteur. Et je lui explique : vous savez, il y a des instituteurs qui lisent, qui s'intéressent vraiment à la littérature. D'accord, pas tous, loin de là, mais il y en a. 

Cette anecdote m'amuse depuis hier mais c'est un amusement qui grince. Soit le médecin, un mec sympa, pas snob, n'a pas écouté quand je lui ai dit que j'étais instituteur, soit, malgré lui, il pense que les instits, eh ben, c'est pas ça rapport au culturel. Je ne peux pas lui donner totalement tort, même à bac +5, les professeurs d'école que j'ai rencontrés ont parfois des manques, y compris en grammaire d'ailleurs. De là à en faire une généralité, c'est évidemment fâcheux. Gardons-nous-en essayant de penser rigoureusement, ce travail de chaque jour et de chaque instant, en fécondant le doute.

La montagne morte de la vie de Michel Bernanos est publié aux éditions L'arbre vengeur dans leur collection de poche L'arbuste véhément. Il coûte 9 €.

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