A - Oh ! moi ! Vous savez.
B - Pareil pour moi. Tant que j'ai mes jambes.
A - Oui. Faut pas trop en demander. Je vais, je viens, ça tire un peu mais rien de grave.
B - Ah ça !
A - On n'est pas les plus malheureux.
B - Sûr que y'a pire.
A - Sauf la tête. La tête, elle suit pas les jambes.
B - Ah ça !
A - Je prends des précautions. De plus en plus j'en prends. Quand je sors de la maison, quand je rentre. Quand je me lève, quand je me couche.
B - Pareil pour moi. Faut penser à tout même quand on pense à rien.
A - Et ça dure.
B - Heureusement qu'on a les jambes. On en fait des choses, avec les jambes.
A - On n'est pas à plaindre.
B - Et pourtant.
A - Comme vous dites !
B - On se console. On se dit qu'on n'a pas mal vécu. Quand on voit ce qui se passe aujourd'hui, hein. Alors oui, se consoler.
A - Moi, je fais des listes de ce qui va bien. Tous les dimanches soir, sur un carnet.
B - Quoi, par exemple ?
A - Oooh ! des petits trucs !
B - C'est vague.
A - Justement, c'est ça qui est bien. C'est des trucs qui passent vite fait et je m'en souviens en les notant, voilà.
B - Vous pourriez m'en lire deux ou trois, de ces trucs ?
A - Avec plaisir. Attendez ! faut que je retrouve mon carnet. Zut ! Où c'est que je l'ai mis ? D'habitude, il est toujours dans le tiroir avec mes médicaments mais là.
B - En tout cas, ça me donne envie. C'est un bon truc.
A - Que vous pourrez noter.
B - Alors, il est où ?
A - Où quoi ?
B - Je sais pas. J'ai perdu le fil.
A - Pas grave. Tant que vous avez vos jambes.
B - Oui oui. C'est une bonne consolation, les jambes ! Elles tricotent encore bien.
image réalisée par les élèves du lycée Le Mirail à Bordeaux autour de l'univers de Montaigne en 2025.
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