mercredi 17 avril 2013

Michel Houellebecq sur BFM



Je ne déteste pas Michel Houellebecq. Son recueil de poésie publié par Flammarion est à peu près indigent et il le sait. N'empêche ! Son premier roman, Extension du domaine de la lutte, édité par le monument Maurice Nadeau, exprime au mieux le désenchantement du monde et de soi. Ses Particules élémentaires, autant qu'il m'en souvienne, posent la question morale et sociétale, voire esthétique, de l'emprise des neurosciences sur la marche improbable du monde. Après, je ne sais pas, car je n'ai pas lu.

Cependant, lors d'un zapping en sirotant un Côtes de Bourg des meilleurs, j'ai attendu son interview sur BMF.TV par la belle Ruth Elkrief. 

Qu'ai-je vu, entendu, senti ?

Un homme désemparé, incapable de dire, de penser, pris dans ses hoquets comme un mulet entravé. 

Parce qu'il n'y a rien à voir, à entendre, à sentir.

Houellebecq n'aime pas les Cyniques et c'est peut-être là son tort, ou tout au moins sa fuite dans une illusion résiduelle. Mais il dit que notre civilisation est à l'agonie, une mort lente d'où suintent les humeurs les plus nauséeuses, des esprits comme des corps, et il a raison de le dire. Que nous reste-t-il en effet en quoi nous pourrions croire ? Comment ne pas avoir l'âme crépusculaire quand la mort s'invite à notre table dans le flux incessant de l'information ?

La politique, Philip K. Dick l'a répété bien avant Houellebecq, n'est plus qu'un jeu de simulacres à loger dans des pixels interchangeables. 

L'homme, à qui on fait bouffer de la merde, qui se fait soigner avec des médicaments de merde, qui consomme de l'électro-ménager programmé pour durer ce que dure la merde, qu'on assassine avec la télé-réalité de merde, est condamné par les puissances maléfiques de l'argent dont Freud disait que c'était de la merde.

Michel Houellebecq est un anti héros de notre temps cancéreux, jamais dupe de l'encensoir complaisant de la belle Ruth, et il est logique qu'il produise de la poésie de merde publiée par un éditeur de merde qui veut rassasier ses actionnaires à la fin de l'an prochain.

Michel Houellebecq, en fait, nous tend avec un sourire sardonique ce miroir que nous ne voulons pas voir : celui de notre propre fin, dans l'affaissement de nos pensées comme dans l'affaissement de nos chairs, incapables de sauter le ruisseau de la fange.

Je n'ignore pas que cet article, pour autant qu'on le lise, surprendra. D'aucuns voudront y voir un abus de Côtes de Bourg. Et pourtant ! Si on réfléchit quelques secondes ! A quoi bon vivre si nous n'avons pas l'élan d'échapper à la bassesse de notre putrescible condition ?
Amen !

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