J'entends à l'étage que tu es en train de te lever. Je ne bouge pas. Je t'écoute. Mon corps tout entier s'ouvre à tes mouvements. Un déshabillé de soie chuinte sur tes épaules. Des chaussettes de grosse laine rouge glissent autour de tes pieds. Tu ouvres la porte de la salle de bain. La glace capte aussitôt ton visage. Tu t'empares de ton reflet, lui pinces le menton, lui tords la bouche. Une mèche échappée se met à voleter et tu ne parviens pas à la rattraper. La soufflerie de la salle de bain en est peut-être la cause. Ma main, ou la tienne, aura ripé sur la mollette de réglage, augmenté le volume. Tu hésites. La mèche de cheveux continue à voleter. Excitée peut-être par un infime courant d'air tombé du velux. Tu te dis toi aussi que quelque chose ne va pas, sans t'étonner, habituée que tu es à l'insolite présence qui naît sous chacun de tes regards, et tu m'appelles comme toujours tu m'appelles sur le coup de dix heures, en sifflant.
Je remets à plus tard mon improbable exploration au centre du bois. Je considère vaguement les piles de livres posées par terre. Toutes sortes d'objets les accompagnent, retournés depuis longtemps à l'état de morceaux. Du papier. Du fer. Du verre. Du plastique. Il faudrait vouloir les ranimer. Rassembler autour d'eux des pans d'histoire, des bribes de mémoire.
En quoi cela me fraierait-il un chemin pour comprendre ?
Tu me parles de tes cheveux poussés par un vent qui n'existe pas et je te confie mon errance de la matinée. Nous rions. L'étrangeté nous est tellement familière. Mais là, c'est autre chose. Un simple déplacement dans les coulisses du monde, nous n'en tiendrions pas compte. Tu marches dans la bibliothèque. Tu prends la mesure de la lumière qui s'encadre à la fenêtre. Onze heures déjà. Je pense au plat préparé que je vais acheter à la boulangerie. La serveuse me demandera si je veux une boisson pour aller avec et je lui répondrai que j'irai sans. J'imagine que, cette fois ci, nous n'aurons pas cet échange rituel. Non pas qu'elle sera fatiguée, ou pressée par un surcroît de travail. Elle aussi, après s'être levée et avoir bu son café debout devant une baie vitrée, aura éprouvé un sentiment identique au nôtre. Quelque chose ne va pas. Tu t'arrêtes de marcher. Tu dis que les piles de livres ne vont pas tarder à tomber. J'objecte qu'elles sont assez stables mais tu n'es pas convaincue. Puis tu me demandes si j'ai regardé le ciel. Ton raisonnement est simple. S'il n'y a rien de notable en bas, il faut regarder en haut. Depuis l'origine des temps l'homme interroge le ciel quand quelque chose ne va pas. Je grommelle. Le ciel est trop grand et je prendrai froid dans le jardin, avec ma robe de chambre qui ferme mal.
Je remets à plus tard mon improbable exploration au centre du bois. Je considère vaguement les piles de livres posées par terre. Toutes sortes d'objets les accompagnent, retournés depuis longtemps à l'état de morceaux. Du papier. Du fer. Du verre. Du plastique. Il faudrait vouloir les ranimer. Rassembler autour d'eux des pans d'histoire, des bribes de mémoire.
En quoi cela me fraierait-il un chemin pour comprendre ?
Tu me parles de tes cheveux poussés par un vent qui n'existe pas et je te confie mon errance de la matinée. Nous rions. L'étrangeté nous est tellement familière. Mais là, c'est autre chose. Un simple déplacement dans les coulisses du monde, nous n'en tiendrions pas compte. Tu marches dans la bibliothèque. Tu prends la mesure de la lumière qui s'encadre à la fenêtre. Onze heures déjà. Je pense au plat préparé que je vais acheter à la boulangerie. La serveuse me demandera si je veux une boisson pour aller avec et je lui répondrai que j'irai sans. J'imagine que, cette fois ci, nous n'aurons pas cet échange rituel. Non pas qu'elle sera fatiguée, ou pressée par un surcroît de travail. Elle aussi, après s'être levée et avoir bu son café debout devant une baie vitrée, aura éprouvé un sentiment identique au nôtre. Quelque chose ne va pas. Tu t'arrêtes de marcher. Tu dis que les piles de livres ne vont pas tarder à tomber. J'objecte qu'elles sont assez stables mais tu n'es pas convaincue. Puis tu me demandes si j'ai regardé le ciel. Ton raisonnement est simple. S'il n'y a rien de notable en bas, il faut regarder en haut. Depuis l'origine des temps l'homme interroge le ciel quand quelque chose ne va pas. Je grommelle. Le ciel est trop grand et je prendrai froid dans le jardin, avec ma robe de chambre qui ferme mal.
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