Du Jardin des Vertus à la Place des pauvres, ce lundi 14 janvier par temps clair. C'est un jardin tout en escaliers parfois sombres et humides qui se gagne au jarret endurant. Quasiment personne en cette matinée alors que des dizaines de touristes font déjà la queue devant la fameuse librairie Lello qui a 113 ans depuis hier. Je m'assois sur un banc et reprends mon souffle. Je laisse du temps à mon regard. Je m'autorise même de ne rien regarder. Je suis là jusqu'au trente et un. Je suis certes un touriste mais pas seulement. Le paysage vient à moi selon son désir.
Puis je descends par des ruelles au pavé irrégulier jusqu'au quai en face du musée de l'automobile. Certaines maisons pourraient s'écrouler d'un instant à l'autre. De nombreuses grues de chantier sont à l'oeuvre dans le secteur comme partout dans la ville. Porto a besoin de se refaire la façade. Mais il y a surtout des requins de la finance en embuscade. Des quartiers entièrement rénovés surgiront mais les habitants seront peu nombreux à en profiter...
Tous les quarts d'heure, je me pose sur un banc, il y en a un grand nombre alors qu'il y en a si peu à Bordeaux, et mes yeux comme mes oreilles papillonnent. Quelques reflets sur le Douro. Deux ou trois mouettes. Une vingtaine de lycéens tonitruants et le vacarme d'un tram hors d'âge. Des pas pressés ou nonchalants de jeunes femmes en boutons. La vie quoi !
Fatigué, je vais m'installer à la terrasse du restaurant où j'allais déjà en 2017, sur la place des pauvres. Je déjeune d'une omelette au jambon et au fromage avec des frites et un grand verre de vin. L'omelette est généreuse et bien garnie. Le prix est modique.
Tout en sirotant mon vin, je pense à ce qu'on raconte du prétendu miracle économique portugais. Je vois beaucoup de SDF que les autorités municipales ne chassent pas, y compris aux abords des immeubles plus riches. Je vois beaucoup de retraités et d'handicapés qui, visiblement, tutoient madame la misère.
Selon, l'OCDE, le salaire minimum s'élevait en 2017 à moins de 700 euros mensuels. J'imagine que la plupart des pensions sont des plus chiches. Les courses alimentaires sont nettement moins chères qu'en France mais les prix que j'ai observés en micro informatique et téléphonie sont les mêmes. Il me semble aussi que l'immobilier, à la location comme à la vente, a notoirement augmenté en deux ans. Le miracle économique portugais est peut-être un leurre malgré la bonne volonté présumée du gouvernement Costa.
J'en saurai davantage à la fin de mon séjour et je vous dirai, après avoir croisé différentes données économiques et sociologiques. Ici, je ne suis pas seulement un touriste. Je suis un observateur.
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