Un poème au pied levé
Va-t-il marcher ou s'envoler
Va-t-il rester suspendu entre deux étendues
Va-t-il dire quelque chose de la matière visible
Va-t-il se diluer dans l'intangible
Va-t-il va-t-il
Le réel est un court-bouillon électrique
Où les mots font tant de charivari
Que bien peu sont saisis
Ils sont empêchés comme les corps
Entre espace et durée
Entre ombre et lumière
Entre le dit et le tu
La mémoire et l'oubli
Les plis et les déplis
Le poète est un apprenti ferrailleur
Il coupe quand il faudrait souder
Il enfonce le clou qu'il voulait extraire
Il rebrousse la langue apprêtée au lissage
Et le poème au pied levé
Tout perclus d'hématomes d'échardes d'entailles
A des suppurations hypodermiques et des spasmes
Aucune marche ne lui ouvre vraiment un chemin
Aucun envol ne le lance vraiment vers le ciel sans azur
Et c'est ainsi depuis les premières lueurs tombées des confins
Dont on n'a jamais su s'emparer
Depuis les premiers signes des pierres
Dont l'énigme résiste
Depuis les premiers cris
Dont l'écho nous tient encore le ventre
Depuis demain déjà là hier
Depuis les larmes à l'affût sous les rires
Depuis depuis
Jusqu'à jusqu'à
C'est ainsi si si
Tant qu'il y aura des mots
Image : Nicola Samori, Kampa Museum Prague, Preparing for Darkness
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