samedi 5 août 2023

Il dit

Il dit que son corps n'est pas à sa place

Et regarde sa main où la peau fait des plis

Il cherche un éclat de plâtre sur le mur

Où se blottir comme dans un silence

Elle écoute sa solitude sans nom ni lieu

Du mauvais sang la lui aura donnée

Elle dit qu'il faut remonter loin pour comprendre

Et que c'est une fatigue toutes les nuits

Quand le froid la prend jusqu'aux yeux

Il dit elle dit il redit elle redit

Leurs mots vont encore dans un peu de joie

Et s'arrêtent au passage des oiseaux

Qui signent dans la lumière blanche

Des petits bouts d'éternité

Le sang a encore du bon pour tendre la main

Même si elle tremble

*

Il dit qu'il reste dans les vertiges inaboutis

Des premiers regards et des premiers mots

Il dit que ses gestes sortent mal de son corps

Comme s'il n'avait pas fini de naître

Et revoit sa mère allongée dans la mort

Qui ne sentait plus sa misère

Sur un drap trop blanc

Une ombre passe qu'il faudrait saisir avant la chute

Un silence lui emboîte un pas feutré

Elle ne dit rien garde aussi ses gestes en dedans

*

Il dit que leurs mots ne sont pas lettre morte

Pour apaiser la soif des oiseaux

Leur souffle tient encore dans le bestiaire

Des premiers émois

Elle dit avec ses yeux qui tremblent

Le partage des heures sombres

Qu'ils éclairaient après la fatigue

Elle dit que le mot amour n'a rien perdu

Sur le chemin où ils continuent d'aller

Et on le cueille quand passent sur les lèvres

Des envies de joies lentes

Les replis ne manquent pas dans les marges

Loin des tumultes qui montent de la chair

Il sourit et se tait son visage a pâli

Quelques traits déjà se défont

C'est quoi vraiment le mot amour

*

Il dit que tout devient plus fragile dans le regard

Les couleurs débordent la matière

Et les émois les sentiments

La chair a jauni comme le rire

Les joies pourtant s'amusent encore

D'un chat qui bondit sur son ombre

Les mots retrouvent les petites beautés

Qu'on voit dans les jardins

Et elle s'abandonne aux déplis murmurants

De sa robe à fleurs électriques

Elle dit que le bleu du ciel ne tournera pas

Que le vol des oiseaux garde la ligne

L'équilibre du monde tiendra jusqu'à la nuit

*

Il dit que sans elle la réalité l'aurait tué

Ses yeux se seraient ternis lentement

Comme des vieux rebuts de verre

Sa peau aurait gardé sous le suint

Les solitudes et les mots endormis

Elle ne dit rien

L'image d'un cloporte la traverse

La bête est sur le dos

Incapable de se retourner

Elle pourrait pleurer

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire