Je reviens juste du laboratoire Synlab à Bordeaux où je vais tous les mois. Une vieille dame avec canne arrive après moi et je la devine perdue. Elle s'accoude au comptoir cependant que les deux employés scrutent des documents et ça dure. La vieille dame tremble. Je lui dis : Allez vous asseoir madame, vous passerez avant moi. Et j'ajoute : Ici, l'empathie c'est pas leur fort. Les deux employés, une proche de la retraite et l'autre proche de l'autisme, m'entendent mais ne bronchent pas. Je connais bien cet homme qui parle si bas qu'il faut avoir des oreilles bioniques et qui ne sait pas que le mot courriel signifie mail. Je ne doute pas de sa qualité professionnelle ni de celle de la dame proche de la retraite qui, elle, est accessible au sourire et peut prononcer deux ou trois mots quand elle procède aux prélèvements. Mais la situation de la vieille dame, tout de même, ils auraient pu la voir quelque ait été leur absorption dans les finasseries administratives, si complexes quand il s'agit du dossier d'un étranger... Alors je suis un peu vénère. Lorsqu'une troisième employée, une jeune qui fait des remplacements, me reçoit pour mon pique pique rituel, je lui raconte la scène. Et là, et là, coup de massue derrière mes oreilles bioniques : "MAIS ON N'EST PAS LÀ POUR S'OCCUPER DES GENS ! C'EST AUX MÉDECINS DE LE FAIRE S'ILS ESTIMENT QU'UNE PERSONNE EST EN DIFFICULTÉS. "
Pour une fois, j'ai eu l'intelligence de me taire. Je ne l'ai pas toujours eue. Le quidam, je me suis déjà fâché après lui. Bien sûr à tort, je le confesse. Mais, en ces temps que nous vivons, où l'ami d'un ancien président en cabane sous-entend que les humains sont des animaux sauf eux, les très riches, je suis de plus en plus sensible au manque d'attention des uns pour les autres. Parce que ça va s'aggraver. Voilà. C'est dit, sans chichis littéraires.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire