Les arbres écrivent aussi. Le paysage à l'entour ne serait rien sans leurs courbes jetées en plein ciel. Les murs des hautes tours offrent à la lune des saillies plus profondes. Une conversation chuchotée, surtout ne pas déranger l'ordre invisible de la nuit, pourra suspendre la fatigue du promeneur. Les arbres durent si longtemps et le béton si peu. Comment faire alors le partage des mélancolies ? Dans quelle pliure des écorces ? Dans quel aplat des rectangles borgnes ?
Le promeneur prêtera l'oreille et le regard. Les signes sont des gestes. Le mouvement parle davantage quand il est immobile. Sa langue ne dissout aucune énigme sur les traverses du monde. Ne révèle que les ombres des présences.
Un frisson passe à fleur de peau. Le promeneur relève son col. Il devine des étendues qu'il n'avait jamais soupçonnées. Il devine qu'il aura besoin de beaucoup de lenteur pour comprendre ce qui guette sous le noir.
Peut-être qu'il se mettra à écrire.
(J'ai proposé à Cédric Merland d'écrire sur son univers photographique. Ses arbres et ses géométries urbaines me plaisent tout particulièrement. D'où ces diptyques. Entre poésie "pure" et narration. Il s'agit d'un premier jet qui pourra être retouché au fil des différents essais. Et peut-être même qu'il y aura, pour lier l'ensemble, quelques grains de sable en couleurs.)