dimanche 26 février 2017

Hélène Cadou sur mon chemin

l'enclos préserve encore
ce qui reste d'humus
pour féconder le ciel*
Je me souviens des bêtes debout la nuit
Leurs paupières lourdes ouvertes
Au silence de la lune
Qui allait tomber
Des frissons couraient sur ma peau
Equarquillaient mes yeux
Mes mots ne savaient pas désigner les mystères
Ne fécondaient rien de mes solitudes
Je n'imaginais pas l'envol des chevaux
Je manquais aussi de fatigue

*

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la chambre fragile
comme un bol de lait
flotte
au-dessus du fleuve*
L'enfance encore tapie sous la peau du lait
Avec ses souvenirs de chambre froide
Quand le blanc recouvrait la campagne
Egarait les pas des hommes et des bêtes
Je l'entends palpiter dans la marche
Battre à mes tempes ses sonnailles d'église
Ses hurlements cloués sur des échelles
Une fois l'an le jour du cochon
Quand me dépouillera-t-elle des mauvaises rumeurs
Qui terrassent mes mauvais rêves

Avec quelle langue inventer la fuite

*


la vie se déroule ailleurs
tu cueilles le dernier raisin
avant de repousser cette porte*
Quelque chose parfois m'immobilise
Le sang ne passe plus dans les mots
Au loin des silhouettes vont penchées
Aveugles à la trame élimée
Des arbres et du ciel bas
Des oiseaux qui se défont dans l'air
Je voudrais rejoindre le repos de leurs ombres
Egrainer encore des pas de géomètre
Oublier tout ailleurs derrière les portes closes

Pouvoir traverser ce qui me traverse

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la nuit
jette sa laine épaisse
sur le dos
des prairies*
La rumeur de la berge s'accorde au silence des ornières
Le sommeil des bêtes grince dans l'étable
Une ombre passe sur la lune
Berce l'enfant qui cherche à grandir
Demain aura-t-il seulement lieu

Si la nuit lui refuse sa porte

*

La lampe cueille le silence
Et fait parure au souvenir.*
La fenêtre assombrit
Le plancher de la chambre
Un grain de plâtre va tomber
Sur les ombres allongées près du lit
Je rassemble ici mes enfances
De berges et de margelles
De courtilières courant sous les humus
De corps figés dans la langue
Mais le cercle de la lampe se défait déjà
Le silence ne tient plus mes mémoires

Les mots ont du sang sur mes lèvres

Image Hélène Cadou editions-brunodoucey.com
Image René Guy Cadou babelio.com

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